Symptômes et dégâts
Considéré en arboriculture conventionnelle comme l’un des pires ravageurs du poirier, le psylle (Cacopsylla pyri) a quelques points communs avec le puceron. C’est comme lui un insecte piqueur suceur très prolifique, qui rejette du miellat. Il a aussi développé diverses formes de résistance aux nombreux insecticides chimiques utilisés contre lui depuis des décennies par les professionnels.
D’abord installées dans les fleurs, les larves gagnent au fil des mues les feuilles, les jeunes rameaux ou le pédoncule des fruits.
© Christian Galinet
Les poiriers sont affaiblis par les prélèvements de sève des larves de psylles présentes en grand nombre sur les jeunes rameaux ou sur les feuilles. Leurs piqûres entravent la croissance de l’arbre et réduisent les récoltes. Le miellat excrété par les larves provoque des brûlures et le développement de fumagine, champignon noirâtre qui réduit la photosynthèse, tache les fruits et entraîne des chutes partielles de feuilles dès le mois d’août. Une observation attentive permet de repérer ces larves, agglutinées sur les jeunes pousses et protégées par leur miellat que viennent récolter les fourmis.
Carte d’identité de ce parasite
Le psylle adulte ressemble à une minuscule cigale. Il appartient à l’ordre des Homoptères, insectes piqueurs suceurs exclusivement phytophages qui comptent – outre les cigales – de redoutables pestes comme les cicadelles, les pucerons, les aleurodes et les cochenilles.
© Christian Galinet
Les œufs, minuscules et de forme allongée, sont déposés par paquets de 6 à 10 à la base des bourgeons ou dans les crevasses de l’écorce.
Plus voraces, et donc plus nuisibles que les adultes, les larves connaissent cinq stades de développement successifs qui les voient doubler de taille à chaque fois, et passer du jaune clair au jaune foncé, puis au brun.
Mode de vie du psylle du poirier
Les adultes, qui se déplacent en sautant ou en volant, hivernent dans les fissures des écorces. Ils sont particulièrement résistants au froid et reprennent leur activité dès le mois de janvier, s’alimentent, puis s’accouplent.
Les premières pontes arrivent en février, dès les premiers beaux jours. Les femelles peuvent pondre de 200 à 600 œufs, et on compte entre quatre et six générations selon les régions. De quoi envahir rapidement vos quelques poiriers, si les conditions sont favorables…
Les premières larves s’introduisent dans les boutons floraux, puis, au fil des mues, sur la face inférieure des jeunes feuilles, à la base du pétiole, sur les jeunes rameaux ou sur le pédoncule des fruits, sur le calice et sur les feuilles. L’hivernage des adultes commence en septembre et jusqu’en décembre selon les générations.
Lutte biologique contre ce nuisible
Le psylle est un ravageur de premier ordre en conventionnel, mais il fait relativement peu de dégâts chez les producteurs bio. Gilles Libourel, technicien arboriculteur au GRAB (1), l’explique ainsi : « la première raison, c’est que l’on maîtrise mieux la vigueur en bio, avec une fertilisation réduite, plus équilibrée et des plantations moins denses, où l’arbre peut s’épanouir. La seconde raison, c’est qu’avec l’absence de traitements chimiques, on préserve les nombreux ennemis naturels du psylle, en particulier les punaises prédatrices anthocorides ». Ces dernières sont d’ailleurs utilisées avec succès en lutte biologique.
Au verger amateur, par contre, les excès de fertilisation, qui augmentent le risque d’attaques de pucerons ou de psylles, sont plus fréquents, en particulier avec les jeunes arbres que l’on a tendance à trop chouchouter. Ou bien avec les terrains carencés : on fertilise davantage sans forcément corriger la carence.
Les larves de psylle prélèvent la sève, affaiblissant les poiriers. Elles sont protégées par le miellat qu’elles excrètent.
© Christian Galinet
Alors, que faire ? Surveillez de très près les jeunes pousses, dès le gonflement des bourgeons.
L’an dernier, j’ai stoppé net une attaque de psylles sur deux très jeunes poiriers en délogeant les larves installées sur les rameaux au jet d’eau, et en installant sur chaque tronc un collier englué antifourmis (comme pour des pucerons). Pour un plus grand verger, pulvérisez sur les larves du savon noir à 2 %, efficace à la fois contre les psylles et pour éliminer le miellat.
Mais évitez tout insecticide, même à base de pyrèthre, pour laisser les prédateurs du psylle finir le nettoyage (punaises anthocorides et mirides, coccinelles, chrysopes, cantharides, etc.). Gilles Libourel conseille au mois de juin la suppression des gourmands en surnombre, qui sont les premiers attaqués. Une autre façon de maîtriser la vigueur.
Enfin, pour éviter le retour des psylles, les professionnels pulvérisent sur les arbres, en février, avant les pontes, une argile calcinée très blanche, la kaolinite. Il semble que les femelles, perturbées par la couleur blanche de l’écorce, ne reconnaissent plus leurs arbres préférés et s’en aillent pondre ailleurs. En attendant que ce produit soit disponible pour les jardiniers amateurs, ceux-ci peuvent également prévoir une pulvérisation d’huiles blanches paraffiniques en fin d’hiver.
Antoine Bosse-Platière