L’argile : un matériau multifonction
Crue ou cuite, on fait avec l’argile des murs, des enduits, des briques, des tuiles ou des poteries. Sans parler de ses vertus médicinales ou cosmétiques. Alors, pourquoi pas des peintures ? D’autant que l’argile est déjà présente dans nombre d’entre elles comme charge minérale (bentonite, kaolin…), qui joue à la fois un rôle d’épaississant et de liant.
C’est le matériau sain par excellence : antistatique et ne provoquant aucune allergie. L’argile possède une structure microporeuse qui lui offre une grande perméabilité à la vapeur d’eau. D’où de remarquables propriétés régulatrices de l’humidité ambiante, qui augmentent avec l’épaisseur (peinture, enduit ou mur).
Avantages et limites d’utilisation
Artisan peintre et décorateur en Isère, spécialisé dans l’utilisation de produits naturels, Bruno Gouttry utilise de plus en plus les peintures à l’argile, même s’il pratique aussi la peinture à la colle ou la peinture à la caséine.
J’apprécie beaucoup leur simplicité d’utilisation. On peut s’interrompre et faire des retouches, même si ça a séché, et tout ce qui tombe se nettoie très facilement. Les peintures à l’argile ont un bon pouvoir couvrant et peuvent même rattraper de petites irrégularités. Il faut cependant rappeler qu’elles ne sont pas lessivables et qu’elles sont sensibles aux frottements répétés : à éviter sur portes et fenêtres. Le rendu mat est superbe avec des nuances dans le renvoi de la lumière qui rappelle la chaux, sans en avoir les contraintes. Mais l’argile absorbe davantage la lumière et j’évite d’utiliser ces peintures dans des pièces sombres.
Bruno Gouttry
Jean-Jacques Tournon, ancien spécialiste et distributeur en peintures écologiques, fait le même constat positif. Mais attention prévient-il :
lorsque vous voudrez les recouvrir, il faudra soit réutiliser le même type de peintures soit passer une sous-couche de blocage.
Composition de la peinture à l’argile
Les compositions varient selon les fabricants, mais on retrouve toujours de l’eau, de l’argile et de la cellulose (colle à papier peint qui sert de liant). Il peut y avoir également d’autres charges : craie, talc, poudre de marbre, parfois aussi des cires (végétales ou d’abeille) ou de l’huile végétale.
La présence de cellulose avec l’eau limite la conservation, mais on peut laisser sécher un reste de peinture et le réhydrater juste avant usage.
Palette de couleurs
A. Bosse-Platière | Terre vivante
Les couleurs proposées vont du blanc au rouge brique en passant par différents tons d’ocre, de brun ou de gris. Il est possible d’élargir encore cette palette, à partir d’une peinture blanche, en utilisant des pigments minéraux. Mais il faudra dans ce cas rajouter un peu de liant (cellulose).
Préparation des supports
Les peintures à l’argile conviennent pour de nombreux supports, de préférence respirants : terre, chaux, plâtre. Ils ne doivent être ni trop poreux, ni trop lisses. On ne peut les utiliser sur du métal, ni après une peinture laque, à moins de la poncer. Comme le dit Bruno Gouttry :
il faut respecter une vieille règle de l’art : pas de maigre sur du gras.
Autrement dit, pas de peinture à l’eau sur une peinture à l’huile, sauf après ponçage. Les peintures à l’argile tiennent sur le bois, pas trop rugueux et non soumis aux frottements (lambris, plafonds). Évitez cependant les bois riches en tanins (chêne, châtaignier) qui peuvent provoquer des auréoles.
Une ou deux couches
Généralement, une couche suffit si la peinture est assez épaisse. On peut cependant en prévoir deux, avec une première couche légèrement diluée, additionnée d’un peu de cellulose (environ 1 % du poids), lorsque le mur présente de nombreuses irrégularités.
Le pouvoir couvrant est de 6 à 8 m² par litre. Concernant la durée de séchage, elle est d’environ 4 heures. Le nettoyage des outils et des taches se fait très facilement à l’eau, avec un peu de savon.
La peinture à l’argile est donc une peinture rustique d’un aspect très plaisant et d’une utilisation simplissime. C’est ce qui explique son succès, malgré un prix relativement élevé (en moyenne, 10 à 15 € le litre).
Antoine Bosse-Platière