Symptômes et dégâts de la noctuelle de la tomate
Il arrive que des jardiniers innocents découvrent que leurs chères tomates ont été dévorées par des chenilles d’une étonnante voracité. À l’origine de ces dégâts, un papillon nocturne d’origine tropicale, qui a profité de la canicule de 2003 pour augmenter sensiblement son territoire. La chenille signe son passage par un orifice situé souvent près du pédoncule, que ne voit pas toujours le cueilleur distrait. Quand vient l’heure de préparer la salade, la surprise est des plus désagréables. La chenille a profondément creusé dans la chair, laissé de nombreux excréments, quand elle n’est pas sortie pour attaquer la tomate voisine. Et agressive avec ça : on la sent furieuse d’être dérangée !
Carte d’identité de ce nuisible
© Christian Galinet
Parmi les quelque 5 000 espèces de lépidoptères (papillons) dénombrées en France, plus de 650 sont considérées comme nuisibles. Helicoverpa armigera, la noctuelle de la tomate, en fait incontestablement partie. Les ailes de l’adulte sont brun jaunâtre chez la femelle, gris verdâtre chez le mâle, et lui confèrent une envergure d’environ 4 centimètres. Les vols sont essentiellement nocturnes, et c’est surtout le stade larvaire (la chenille) que vous pourrez observer. Elle est peu visible à son premier stade car translucide, et ne dépasse guère 2 à 3 centimètres. Mais au terme de son développement, elle peut atteindre 4 centimètres. Elle est verdâtre, jaunâtre ou brune, ornée de deux minces bandes dorsales plus sombres et flanquée de deux bandes latérales claires et sinueuses caractéristiques.
© Christian Galinet
Trois autres larves de noctuelles s’attaquent également à la tomate : la noctuelle gamma (Autographa gamma), vert clair avec six lignes blanches longitudinales, dévore les feuilles de tomate et de nombreux autres légumes. La noctuelle arpenteuse de la tomate (Chrysodeixis chalcites), d’origine tropicale, fait de même, mais elle est verte avec un trait jaune de part et d’autre. Enfin, la noctuelle potagère (Mamestra oleracea) creuse les fruits verts, mais sans y pénétrer.
Mode et cycle de vie de la noctuelle de la tomate
En régions tempérées, la larve hiverne dans le sol : elle s’enfouit à plusieurs centimètres de profondeur et passe l’hiver à l’état de chrysalide. Les premiers vols de papillons se produisent en avril mai dans le Midi et peuvent se poursuivre jusqu’en octobre. La femelle pond plusieurs centaines d’œufs isolément, de préférence sur les jeunes pousses, sur la face inférieure des feuilles. Au premier stade larvaire, les petites chenilles sont arpenteuses et consomment les jeunes feuilles. Dès le second stade (il y en a six), elles peuvent pénétrer dans les tomates et commencent à les dévorer de l’intérieur. Un cycle complet dure un peu plus d’un mois, et il peut y avoir deux à quatre générations par an…
La chenille est agressive, carnivore, voire cannibale si elle rencontre une congénère.
© Christian Galinet
Dans les régions méditerranéennes, cette charmante bestiole s’attaque également au poivron, à l’aubergine, à l’artichaut, aux haricots et aux courges. C’est aussi l’un des principaux ennemis du maïs et du cotonnier en zone tropicale.
Techniques de lutte bio
Comme les autres noctuelles, celle de la tomate a quelques ennemis naturels qui peuvent réduire les pullulations : les chauve-souris, chasseuses de papillons, et bon nombre d’oiseaux insectivores, à l’instar des mésanges, grandes dévoreuses de chenilles. Faites-en sorte que votre jardin leur soit accueillant. Pour cela, plantez des arbustes pourvoyeurs de petites baies qui leur octroie de quoi s’alimenter et se réfugier ainsi que des plantes mellifères qui attirent les insectes pollinisateurs.
Une fois à l’intérieur de la tomate, la chenille est à l’abri de tout traitement. Le classique Bt (Bacillus thuringiensis) produit de lutte biologique, n’est donc efficace que contre les papillons et les toutes jeunes larves. C’est la raison pour laquelle les professionnels utilisent le piégeage sexuel pour repérer les vols de papillons et traiter avec le Bt au bon moment.
Le jardinier qui constate les premiers dégâts traitera au Bt (vendu en jardinerie) tous les dix jours pour espérer atteindre les différentes générations de chenilles au moment où elles sont vulnérables. Réalisez une pulvérisation fine et qui englobe bien toutes les parties de la plante. Enfin, ne manquez pas de détruire les chenilles que vous délogez. Malgré son “agressivité” et le mouvement instinctif de recul qu’elle inspire, la chenille ne vous mordra pas…
Antoine Bosse-Platière