Mesdames et messieurs, la reine et sa cour ! La couleur verte de la pastille indique l’année de naissance de cette reine et permet de la repérer plus facilement.
U. Westphal |
Ce contenu est extrait du livre Manuel d’apiculture douce de Undine Westphal.
Le rôle des phéromones chez l’abeille mellifère est physiologiquement comparable à celui des hormones chez l’être humain. L’abeille possède le système de communication à base de molécules le plus complexe qui soit dans la nature. Certaines phéromones sont transmises d’une abeille à l’autre et se répandent ainsi dans toute la colonie. Une phéromone peut être liquide ou gazeuse, transférée par contact direct ou transportée par l’air. Chaque abeille, et pas seulement la reine, produit des phéromones grâce à 15 glandes différentes. Les larves émettent aussi diverses phéromones.
UN RÈGNE DE PHÉROMONES
Par ses glandes mandibulaires, tergales, tarsiennes, de Koschevnikov et de Nasanov, la reine sécrète des phéromones royales (appelées « odeur de la reine »). Elles sont ensuite ingérées par les ouvrières et transmises dans toute la colonie par échange de nourriture. Ces phéromones contiennent notamment des antibiotiques. En mai, quand la population de la ruche augmente rapidement, la concentration en phéromones royales dans la colonie diminue. Les ouvrières sont ainsi informées que la population est trop grande (ou que la reine ne pond plus assez) et se mettent à construire des cellules royales. La sécrétion de phéromones par la reine commence à diminuer vers 3 ans.
Les phéromones de la reine incluent aussi la phéromone sexuelle qui se forme progressivement : une reine-vierge à peine éclose n’en possède presque pas. En effet, le potentiel de la phéromone sexuelle ne déploie son effet qu’à l’extérieur de la ruche, pendant le vol nuptial, et après la fécondation. C’est pour cela qu’il est très difficile, voire impossible d’introduire une reine non fécondée dans la colonie, en particulier pendant la miellée.
La phéromone d’alarme sent la banane mûre : ne mangez jamais de banane près d’un rucher.
Contrôle d’identité à l’entrée de la ruche au retour des butineuses.
U. Westphal |
LE FONCTIONNEMENT DES OUVRIÈRES
Les éclaireuses marquent les sources de nourriture abondante avec des phéromones, afin d’aider les butineuses à les trouver, et celles-ci en font autant pour les retrouver ensuite. Pour indiquer le chemin de la ruche aux butineuses de retour, les ouvrières battent le rappel sur la planche d’envol. Elles relèvent l’abdomen et abaissent le dernier anneau à son extrémité pour découvrir leur glande de Nasanov. Dans le même temps, elles battent rapidement des ailes pour diffuser la phéromone émise par cette glande. Les phéromones de ce genre sont très volatiles et sensibles à la température ; elles ne sont généralement perceptibles qu’à une dizaine de centimètres de distance.
Toutes les abeilles déposent en marchant sur la planche d’envol une phéromone produite par les glandes tarsiennes, dont elles marquent aussi les rayons. Ces « empreintes » permettent d’identifier la ruche et sont beaucoup plus stables que la phéromone d’alarme, par exemple.
En cas d’attaque, les abeilles diffusent en effet une phéromone d’alarme sécrétée par leurs glandes mandibulaires, maxillaires et venimeuses. Les gardiennes cherchent ainsi à recruter des renforts et à augmenter leur agressivité, soulevant l’abdomen et sortant leur dard pour sécréter une goutte de venin. L’attaque se produit ensuite contre les cibles mouvantes et de couleur sombre. Quand une abeille pique, le point de la piqûre est également marqué par des phéromones qui incitent les autres à piquer au même endroit (ouille !). La phéromone d’alarme est très volatile afin que les abeilles de la même colonie ne s’entretuent pas dans l’excitation générale ou à cause d’un niveau d’agressivité trop élevé. Son effet peut être diminué par la fumée, qui sature les antennes.
La phéromone du couvain est sécrétée par les larves et les nymphes. Elle empêche les ouvrières de quitter la ruche et les encourage à produire de la gelée royale pour les nourrir. Elle incite également les butineuses à rapporter du pollen qui servira à la fabrication du pain d’abeille. Cette même phéromone inhibe la formation des ovaires chez les ouvrières.
Ce rayon de couvain bien rempli contient environ 2000 cellules de couvain.
U. Westphal |
FAITES CONFIANCE À VOTRE NEZ !
Pour pouvoir nous occuper de nos abeilles, nous ouvrons la ruche. C’est le moment de fermer les yeux et de humer. Que sent la ruche ? A-t-elle une odeur plaisante de cire chaude et de miel ou a-t-elle une odeur acide, voire de moisi ? Dans ce deuxième cas, observez attentivement les rayons. Si les rayons latéraux sont couverts de moisissures, remplacez-les tout de suite par des partitions.
Observez maintenant le couvain. Est-il entièrement operculé ou y a-t-il de nombreuses lacunes ? Les opercules des alvéoles se sont-ils affaissés, certains sont-ils ouverts ? Procédez à un prélèvement de couvain pour exclure la suspicion de loque américaine. Si vous trouvez sur la grille du plancher des abeilles mortes et moisies, elles sont peut-être la cause de cette odeur. En plein développement, la loque américaine a une odeur légèrement acidulée de chocolat amer.
En cas d’odeurs inhabituelles, il est utile de comparer avec d’autres ruches. Normalement, une colonie a une odeur divine, et plus il fait chaud, plus l’odeur est forte. En hiver, elle est plus discrète, mais toujours agréable, jamais écœurante. Si une ruche sent l’urine en hiver, c’est qu’elle héberge peut-être une souris.
Bon à savoir
Nous percevons mieux, et avec une plus grande finesse, les odeurs les yeux fermés, ce qu’on peut constater lors d’une dégustation de miel. Il faut également savoir qu’une colonie d’abeilles a une odeur beaucoup plus marquée dans une ruche en bois que dans une ruche en plastique.