Les principes de la taille en douceur

Article publié le
Trois règles essentielles d’une taille en douceur valables pour les arbres fruitiers et pour les arbres et les arbustes d’ornement.

A. Pontoppidan |

Cet article est extrait du livre J’apprends à tailler mes arbres d’Alain Niels Pontoppidan.

 

La taille en douceur, telle que présentée dans le livre « J’apprends à tailler mes arbres » dont est extrait cet article, s’appuie sur une compréhension du fonctionnement naturel des arbres afin d’établir les bases d’une approche de la taille qui soit à la fois efficace et respectueuse du fonctionnement des arbres.

 

TROIS RÈGLES À RETENIR POUR UNE TAILLE EN DOUCEUR

Règle 1

Il faut couper toute la branche (sans laisser de chicot) et rien que la branche (sans entamer ni le col ni la ride de l’écorce). – Voir encadré plus bas.

Respecter le bon angle de coupe, comme on vient de le voir, garantit le meilleur recouvrement possible et donne à l’arbre toutes les chances de refermer rapidement ses blessures.


Le respect de cette première règle de taille en douceur garantit le meilleur recouvrement possible.
S. Moréteau |

 

Règle 2

Une branche, un rameau ou une brindille, doit être totalement enlevée ou totalement conservée.

La première règle concernant l’emplacement de la coupe conduit à en énoncer une seconde, qui cette fois-ci correspond à l’organisation du réseau de branches. Puisque la coupe idéale est située au ras de la ride de l’écorce, toute branche, toute brindille ou tout rameau, doit être soit totalement enlevé, soit totalement conservé. C’est une taille par tout ou rien, sans raccourcissement, qui est cohérente avec ce que nous savons du fonctionnement de l’assemblée des bourgeons. On ne coupe jamais une branche en plein milieu. Les rameaux à tailler sont entièrement supprimés, les autres conservent intact leur bourgeon terminal, donc leur centre de régulation.


S. Moréteau |

 

Règle 3

La taille conserve à l’arbre sa structure fondamentale.

Un arbre se construit de manière méthodique : il possède un ordre, une organisation qui lui est propre. Il ne faut donc pas faire de suppression intempestive de charpentière (grosse branche principale qui part directement du tronc) ni d’étêtages radicaux. La taille doit préserver le port naturel de l’arbre, elle ne modifie pas la silhouette qui lui est propre.

 

QUAND DOIT-ON TAILLER ?

La taille en douceur bouscule les idées reçues. On ne taille pas seulement en hiver. Il est possible de tailler à d’autres périodes de l’année. L’activité végétative de l’arbre au moment de la taille est même considérée comme un avantage pour le recouvrement des plaies, qui se fait mieux quand la sève circule.

D’un point de vue strictement pratique, pour la commodité de l’intervention, les arbres fruitiers se taillent de préférence en hiver ou parfois juste après la récolte des fruits en évitant simplement certaines périodes critiques.

Les périodes de taille à éviter :

  • au moment de la chute des feuilles ;
  • au moment de la montée de sève ;
  • en période de canicule ou de stress hydrique.

L’expérience a montré que le recouvrement et la compartimentation sont beaucoup moins actifs pendant ces périodes.

 

 


Couper au bon endroit

L’arbre réagit à la coupe des branches. La rapidité de recouvrement de la plaie, donc sa guérison, dépend entièrement de l’emplacement du plan de coupe.

À l’endroit où la branche s’insère sur le tronc, sur le dessus de la fourche, on trouve une sorte de replis, un bourrelet appelé la ride de l’écorce. Elle est bien visible sur la plupart des espèces. Du côté opposé à cette ride, sur le dessous, se trouve un renflement, plus ou moins bien marqué, nommé le col de la branche.

Ces deux éléments, ride de l’écorce et col de la branche, n’appartiennent pas à la branche, mais au tronc. Ils délimitent une zone de barrage. Celle-ci réagit en produisant des substances inhibitrices des champignons et favorise la formation d’un bourrelet régulier qui va rapidement refermer la blessure. Il est fondamental de tailler juste au ras de cette zone de barrage. Une coupe effectuée trop loin, au-delà du col, laisse un chicot qui ne sera pas recouvert par le callus. Inversement, si on taille trop court, au ras du tronc, la plaie est inutilement agrandie et mettra plus de temps à refermer.

La ride de l’écorce est présente à tous les niveaux de ramification, aussi bien dans le cas d’une branche principale insérée sur le tronc, que dans celui d’une branche secondaire insérée sur une branche plus grosse.


La coupe idéale se situe selon un plan juste au ras du col de la branche et de la ride de l’écorce.
A. Pontoppidan |

 


Le dessèchement du chicot s’arrête au niveau de ce qui aurait été le plan de coupe idéal.
A. Pontoppidan |

 


Dans le cas d’une branche sans col, la coupe est parallèle à l’axe de la branche principale, perpendiculairement à la branche, au-delà de la ride de l’écorce.
A. Pontoppidan |

 

Pour effectuer les coupes avec précision, il faut être en mesure de déterminer où se trouve la limite entre deux ramifications. Certaines espèces, comme le peuplier blanc, le cèdre ou l’épicéa ont un col très marqué, qui entoure totalement la branche. Dans ce cas, pas de problème, taillez au ras du col de la branche sans l’entamer. Lorsque le col de la branche n’est pas visible, coupez perpendiculairement à l’axe de la branche, juste au-delà de la ride, sans l’entamer.

 


Coupe des brins d’une fourche


Coupe d’un brin d’une fourche.
A. Pontoppidan |

Le cas de taille le plus délicat est la suppression d’un des brins d’une fourche. Si on coupe selon une oblique trop inclinée, on risque de faire une plaie importante qui pourrira avant de se refermer. Si on coupe perpendiculairement à la branche, on laisse un chicot impossible à recouvrir. Il faut tailler selon une oblique moyenne, qui part juste au ras de la ride de l’écorce, en supprimant toute la branche à tailler. Ce genre de coupe doit être réservé aux branches de faible diamètre, à cause des risques importants de pourriture qu’il comporte.

 


Branche principale ou branche secondaire ?


Suppression du prolongement en conservant la branche secondaire.
A. Pontoppidan |

Les explications qui précèdent concernent la suppression d’une branche ou d’un rameau latéral. La branche principale est conservée, la branche secondaire est taillée. Mais que se passe-t-il lorsque c’est l’inverse ? Quand c’est le prolongement de la branche principale qui doit être taillé et non l’une des branches latérales. C’est une situation de taille très fréquente. Ici encore, c’est la ride de l’écorce de la branche qui sert de point de repère. On va raccourcir la branche principale au niveau d’une ramification latérale, de façon à lui donner un nouveau prolongement, muni d’un bourgeon terminal. La coupe s’effectue au ras de la ride, selon un plan parallèle à l’axe de la branche latérale. C’est elle qui va constituer le nouveau prolongement.

 


Le mastic « cicatrisant »

Lorsque la plaie est d’une certaine importance, il peut sembler judicieux de protéger cette porte d’entrée aux maladies par un badigeon ou un mastic qualifié de « cicatrisant ». Il faut savoir que l’efficacité de cette pratique est très controversée et que ce qui compte, avant tout, c’est la qualité de la coupe. Si le cambium est endommagé ou arraché, ou si on a coupé trop près du tronc sans tenir compte de la zone de barrage, le mastic n’y changera rien. De même, si on laisse un chicot, il finira toujours par pourrir, même si on le recouvre d’une épaisse couche de « cicatrisant ».

 

 

Alain Niels Pontoppidan