Cancérogènes ou pas ?
Les laines minérales isolantes contiennent plus de 90 % de fibres. Concernant les 10 % restants :
- entre 3 et 5 % de résines phénoliques qui assurent la cohésion du produit ;
- moins de 1 % d’huile minérale qui limite l’émission de poussière et l’absorption d’eau ;
- puis 4 à 6 % d’une composition non spécifiée.
Depuis le scandale de l’amiante, finalement interdite en janvier 1997, le danger des laines minérales pour la santé a fait l’objet d’une importante controverse scientifique. C’est-à-dire que l’extrême finesse des fibres des laines minérales leur permet, comme l’amiante, de pénétrer très profondément dans les alvéoles pulmonaires. La polémique porte donc sur leur caractère cancérogène.
Aucun lien statistique n’a pu être établi entre l’exposition à ces fibres et le cancer du poumon. Toutefois, plusieurs études dans divers pays ont abouti à leur classement par le Centre international pour la recherche sur le cancer (CIRC), en juin 1987, comme « cancérogènes possibles pour l’homme » (groupe 2B). À ce sujet, en l’an 1999, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) a publié un rapport complet pointant du doigt le manque de preuves. Ces fibres ont-elles réellement un impact cancérogène direct sur la santé humaine ? En réponse, les fabricants, acteurs du syndicat national des Fabricants d’isolants en laines minérales manufacturées (FILMM), ont réagi en modifiant légèrement la composition des fibres. L’intérêt ? Améliorer leur solubilité et réduire leur « biopersistance » dans l’organisme. Résultat, les laines minérales ont été reclassées par le CIRC en octobre 2001 dans le groupe 3 (cancérogénéité non évaluable) :
des effets cancérogènes possibles, mais insuffisamment évalués.
Depuis 2002, les industriels peuvent certifier leurs produits non cancérogènes via la certification European certification board for mineral wool products (EUCEB). Une mesure en accord avec la Note Q de la directive 97/69/CE. Les laines minérales approuvées par cette certification sont donc en théorie uniquement considérées comme irritantes pour la peau.
Niveau d’exposition
Cette exonération du classement cancérogène n’en fait pas pour autant des produits sans dangerosité. En effet, l’Union européenne classe ces substances comme préoccupantes, mais une grande partie du marché commercialisé en France est déclassé. L’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) souligne que les données disponibles concernent les lieux de production et les niveaux d’exposition sont plutôt faibles. Qu’en est-il lors de la pose, du découpage, ou de la dépose des isolants ? Ou encore, lorsque des faux plafonds ou des lambris disjoints laissent s’échapper dans l’air intérieur d’importantes quantités de fibres, provenant d’isolants dégradés ?
Là encore, les fabricants ont fait quelques efforts : amélioration de l’encollage, et enrobage de certains isolants (voile de verre ou film organique). Mais outre que cela ne concerne que les récentes fabrications, les mesures de précaution à prendre, lors de la pose ou de la dépose des isolants, recommandées par l’Organisation internationale du travail (OIT), sont assez drastiques. Concrètement, ces mesures de précaution témoignent de la présence de réels risques.
D’autres risques pour la santé
Les fibres de la laine de verre sont cassantes, et de ce fait, très irritantes. À la fois pour la peau (démangeaisons, irritations, dermatoses), et pour les voies respiratoires supérieures (inflammations, trachéites, laryngites, etc.) Les liants, à base de résine formophénolique et d’urée, dégagent de petites quantités de formaldéhyde (du méthanal). Ce composé organique est connu pour provoquer des allergies et de l’asthme. Certes, beaucoup moins que les agglomérés, mais de plus en plus de personnes en sont allergiques. C’est pourquoi la mise en oeuvre doit être particulièrement contrôlée.
Un écobilan plutôt médiocre
Au-delà des problèmes de santé, l’écobilan des laines minérales n’est pas très brillant. Les quantités d’énergie grise nécessaires à leur fabrication sont évaluées à 250 kWh/m3 (laine de verre) et 150 kWh/m3 (laine de roche), contre 30 kWh/m3 pour les isolants en fibre de lin. En plus, elles constituent des déchets potentiellement toxiques en fin de vie, lors de démolitions ou de rénovations. Enfin, leur efficacité peut être remarquablement réduite en cas d’attaque par des rongeurs. Surtout que ces laines minérales absorbent l’humidité.
Finalement, si vous décidez de les utiliser, en raison de leur bon rapport coût/performances, et malgré leurs inconvénients, faites-le entre deux parois bien hermétiques. Lors des manipulations, de la découpe ou de la pose, portez un masque (de type P3), ainsi que des lunettes, des gants, et des vêtements bien fermés aux extrémités. Ces actions préventives auront pour effet d’éviter toute irritation.
Antoine Bosse-Platière