J. Houtkamp |
Les principaux critères de choix
La durabilité est un des premiers critères à prendre en compte. Soumis à d’énormes contraintes, les revêtements de sol peuvent être remplacés plusieurs fois pendant la durée d’utilisation d’un bâtiment. Une bonne durabilité est donc le gage d’une importante économie de ressources. L’écobilan du matériau prend en compte les matières premières, renouvelables ou largement disponibles, leur origine (pour limiter les transports), l’énergie grise et les émissions de CO2 nécessaires à leur fabrication, les possibilités de recyclage et de stockage… En résumé, cela va de la création du matériau jusqu’à son élimination en fin de vie. Ces données ne sont malheureusement pas toujours disponibles ni établies de manière standardisée. Mais, ces premiers critères permettent déjà d’éliminer trois familles :
- Les revêtements PVC (parfois appelés improprement lino). Ils émettent de nombreux composés organiques volatils (COV) nocifs. En plus, ils contiennent de dangereux phtalates (plastifiants) ;
- Les sols stratifiés se définissent comme étant un aggloméré recouvert d’un papier imprimé, en général un décor bois, et d’une couche d’usure en résine. Ils émettent des COV et encore trop de formaldéhyde, un composant cancérogène très volatil, contenu dans beaucoup de colles ;
- Les moquettes synthétiques qui augmentent l’électricité statique. Elles sont d’impitoyables réservoirs à poussières et à allergènes. Selon la composition de leur sous-couche, elles peuvent émettre elles aussi beaucoup de COV.
En fonction de l’usage de la pièce, choisissez un revêtement de sol (en fibres naturelles) adapté.
- Plutôt résistant et facile à entretenir pour une entrée ou un couloir.
- D’origine végétale moins dur, moins sonore et moins glissant pour des chambres.
- Pour une salle de bains ou une cuisine, le revêtement devra au contraire apporter une solution contre l’humidité.
- Un revêtement ne retenant pas les poussières et saletés, facile à nettoyer (chambres de personnes asthmatiques).
- Peu isolant pour une compatibilité avec un chauffage par le sol.
Au niveau législatif
Pour vous repérer, depuis le décret du 23 mars 2011, les industriels ont l’obligation d’étiqueter leurs produits avec un pictogramme visuel selon le niveau d’émissions de composés organiques volatils (COV). L’échelle s’étend de A+ pour les bons élèves, à C pour les fortes émissions (arrêté du 19 avril 2011). Cette réglementation concerne un certain nombre de produits de construction et de décoration (colles, peintures, murs, isolants…). En complément, le classement UPEC (Usure, Poinçonnement, Eau, Chimie), mis en place depuis 2015, évalue et certifie les performances des produits industriels. Plus spécifique aux colles et adhésifs, la certification EMICODE valorise quant à elle les produits à (très) faibles émissions, via un classement en trois catégories. Une autre certification assez connue : la Norme Française (NF). Les fabricants, de manière volontaire cette fois-ci, font attester leurs produits pour garantir leur conformité face aux nouvelles réglementations. Ce critère de qualité supplémentaire suscite davantage de confiance chez leurs clients face à la multiplication de produits concurrentiels sur le marché.
Autre chose, suite à l’arrêté du 20 avril 2017 à l’article 9, les revêtements de sol des établissements recevant du public doivent impérativement se conformer aux normes d’accessibilité handicap. Cela sous-entend : pas de gêne visuelle ou sonore, ni d’obstacle à la circulation.
Les différentes fibres naturelles
Parquet
Sain, durable, chaleureux, et issu d’une matière première renouvelable, le parquet est proposé en lames de bois massif ou formées de plusieurs couches d’essences différentes.
- La lame de parquet massive traditionnelle est dite “porteuse” à partir d’une épaisseur de 21 mm. Celle-ci se cloue sur des solives ou des lambourdes.
- Mais ce qui se développe le plus, ce sont des lames de moindre épaisseur (10 à 15 mm). Ces dernières sont moins coûteuses, constituées de trois couches collées. Elles forment ce qu’on appelle un plancher flottant. À ce sujet, préférez les lames constituées de deux couches de sapin et d’une couche d’usure en bois noble, même si elles sont assez chères. Les plus courantes, constituées d’une couche en panneau de particules ou en contreplaqué entre deux couches de bois, contiennent beaucoup trop de colle.
Les lames sont simplement posées sur un sol parfaitement plan, recouvert d’un isolant phonique (plaques de fibres de bois, rouleau en fibres de coco…). Puis, elles sont collées ou emboîtées entre elles. Ce plancher flottant n’étant pas solidaire de la structure, les bruits d’impact ne sont pas transmis.
A. Bosse-Platière |
Sur le plan écologique, il faut s’interdire les parquets en bois exotique, même bardés de la certification Forest Stewardship Council (FSC), assurant la gestion soi-disant “durable” des forêts tropicales. En effet, certaines certifications sont détournées. En plus, les transports émettent beaucoup de CO2. Quoi qu’il en soit, nous disposons déjà d’un vaste choix d’essences européennes bien adaptées à cet usage (chêne, châtaignier, érable, hêtre, frêne, mélèze…).
L’utilisation de colles pouvait autrefois poser problème (pour la fabrication des lames multicouches et leur application à la pose). En fait, les colles sont fortement émettrices de COV, solvants et formaldéhyde. Assurément, ce n’est plus le cas des nouvelles générations de colles étiquetées par le label EMICODE. Elles sont même équivalentes aux colles vinyliques en dispersion aqueuse, à faibles émissions de COV. Quant à l’entretien, un traitement à l’huile dure et à la cire est indispensable. On trouve aussi des vernis vitrificateurs écologiques, ou d’autres plus classiques en phase aqueuse. Ils émettent peu de COV, mais nécessitent tout de même une bonne aération, pendant et après le chantier.
Liège
Disponible en dalles à coller ou clipsables, le liège est issu d’une matière première renouvelable, mais limitée. En effet, il faut une dizaine d’années à l’arbre pour reformer une écorce exploitable. Pourtant, c’est un bon isolant acoustique et thermique (on évitera de le poser sur une dalle chauffante). Il résiste bien à l’humidité, ne prend pas la poussière, et nécessite peu d’entretien.
Toujours dans une démarche écologique, évitez les dalles revêtues de résines autres que d’origine végétale. Puis, protégez les dalles de liège naturel avec de l’huile dure et de la cire naturelle.
Linoléum naturel
Le véritable lino n’a rien à voir avec les revêtements synthétiques bas de gamme qui ont usurpé son nom.
Il est fabriqué à partir d’une pâte contenant huile de lin, colophane, poudre de liège et de bois, craie et pigments, le tout fixé sur une toile de jute. Le lino est un matériau d’une très grande résistance. En rouleaux ou en dalles, il est d’entretien facile et antistatique. Il serait même bactéricide (du fait de l’oxydation progressive de l’huile de lin). Sa fabrication ne demande pas beaucoup d’énergie et il absorbe les bruits de pas.
Au chapitre des inconvénients, il craint les projections d’eau pouvant le faire gonfler. En plus, il est assez coûteux et délicat à poser “à l’ancienne”. Encore une fois, attention au choix de la colle ! Sinon, aujourd’hui, on trouve plus couramment des dalles de revêtement composite, formées de deux parties :
- Une couche mince de liège (absorbant les vibrations) ;
- Un panneau de bois médium (sans colle) recouvert d’une couche de lino.
Elles s’assemblent sans joint visible grâce à un rainurage spécial. Plus besoin de colle, il suffit de clipser les dalles entre elles, comme pour un plancher flottant.
Fibres végétales
Sisal, fibre de coco, jonc de mer et jute forment des revêtements superbes, issus de fibres naturelles. Ils sont souvent mis en valeur dans les revues de décoration. Cependant, ils absorbent tous les liquides et restent difficiles à entretenir (nettoyage à sec avec des poudres absorbantes). Ce sont en outre des réservoirs à poussière et à allergènes (surtout si l’on possède des animaux domestiques). Attention également aux émanations nocives des colles proposées pour la pose et parfois aussi des sous-couches en caoutchouc synthétique. Enfin, sur le plan écologique, la plupart de ces revêtements proviennent de pays lointains, où les conditions de travail dans les manufactures ne sont généralement guère enviables.
Moquette de laine
F. Vessia |
Elle présente les mêmes inconvénients que les revêtements en fibres végétales, et a une durée de vie plus limitée. Elle est de plus, particulièrement propice au développement des acariens et de leurs allergènes… sans oublier les mites. Vigilance aussi vis-à-vis des émanations nocives des sous-couches synthétiques de certaines moquettes en laine (préférez celles avec sous-couche en feutre textile). Attention aussi à certains produits antitache et aux moquettes avec traitements antimites. Il vaut mieux renoncer au confort moelleux d’une belle moquette en laine naturelle, à moins de posséder un aspirateur à filtre HEPA (les plus fins). Autrement, équipez votre maison d’une aspiration centralisée. Ce dispositif élimine à coup sûr allergènes et fines poussières vers l’extérieur.
Le comparatif
Revêtement | Écobilan | Entretien | Usage conseillé | Conditionnement |
Parquet bois | +++ | ++ |
Séjour, chambres, couloirs.
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Lames bois massif, lames pour planchers flottants, panneaux à coller. |
Liège |
++ |
+++ | Séjour, chambres, salle de bains. | Dalles à coller ou clipsables. |
Lino | ++ | +++ | Chambres, salle de jeux | Rouleau ou dalles à coller, dalles clipsables. |
Sisal, coco, jonc de mer… | +/- | – | Séjour, chambres (1). | Rouleaux à coller. |
Moquette laine | ++ | – | Chambres (1). | Rouleaux à coller (ou adhésif double face). |
(1) Déconseillé aux asthmatiques.
Nous n’avons pas indiqué de prix car pour la plupart de ces familles de produits, on trouve un très large éventail de qualités, et donc de prix. Tout dépend de vos envies et de vos projets, en adéquation avec les atouts et inconvénients de chaque matériau. À savoir que d’autres revêtements sont tout aussi intéressants. Pourquoi pas envisager un parquet chevrons (tendance Haussmannienne), un revêtement en bambou (très résistant, adapté aux couloirs, chambres et salons), ou encore, en caoutchouc naturel (imperméable, parfait pour des salles d’eau).
Antoine Bosse-Platière