La graine, un réservoir génétique
Fruit de la fécondation, la graine est le résultat d’une combinaison génétique originale et inédite. Depuis la naissance de l’agriculture, le cultivateur a appris à repérer les caractères d’une plante qui l’intéressaient (précocité, résistance, productivité, goût…) et à sélectionner les graines correspondantes. Bien souvent, il a encouragé de nouveaux mélanges pour créer des variétés aux qualités complémentaires. Ainsi, au fil des campagnes de culture et au hasard des rencontres de pollens et de stigmates (organe femelle de la fleur), le patrimoine culturel des semences s’est étoffé. Tout cela, sous l’œil vigilant des générations de paysans et jardiniers. L’intervention de l’être humain dans ce ballet des chromosomes s’est faite de plus en plus pressante, jusqu’à la création des organismes génétiquement modifiés (OGM). Toutefois, la sélection des graines est effectuée par quelques multinationales de l’industrie agrochimique (entre 8 et 10 pour toute la planète). Leurs critères de sélection sont basés sur les contraintes de l’agriculture productiviste : forte productivité, aspect irréprochable, tolérance aux pesticides, bonne réponse aux engrais minéraux, longue conservation et bonne résistance au transport pour une commercialisation en circuit long, sur des centaines de kilomètres.
Soutenir la biodiversité, pourquoi et comment
La disparition de nombreuses variétés de plantes et légumes restreint de plus en plus notre consommation alimentaire. Les raisons ? Entre autres, le déclin d’insectes pollinisateurs comme les abeilles, les modifications de l’environnement, la création de réservoirs de substances pour usages thérapeutiques, etc.
C’est pourquoi, tout jardinier peut revendiquer la souveraineté de la production de semences en achetant sur des plateformes d’échanges, ou auprès d’un réseau de producteurs de semences indépendants. Les nombreuses fêtes de trocs de graines et d’échanges offrent à cette occasion la possibilité de participer à la diffusion de graines.
De quelles semences a besoin un jardinier bio ?
Les variétés classiques
Dans un jardin bio, la priorité est de créer les conditions favorables au développement de plantes vigoureuses, permettant d’éviter l’utilisation de pesticides. Les variétés anciennes, sélectionnées pour leur résistance, y trouvent naturellement leur place. De même, des variétés locales adaptées au terroir, sont moins sensibles à des attaques de parasites et prédateurs. De plus, la diversité des espèces et variétés au potager met le jardinier bio à l’abri d’une perte massive de sa production quelles que soient les conditions climatiques de la saison à venir. En dehors des conservatoires, des producteurs et associations proposent de larges gammes de variétés intéressantes sur le plan gustatif. Aux formes et aux couleurs surprenantes à découvrir.
Par ailleurs, les pratiques du jardinier bio sont destinées à préserver la qualité de la terre, de l’air et de l’eau. C’est pourquoi il privilégie aussi l’approvisionnement en graines biologiques. En effet, la production de semences indemnes de contamination par des graines de mauvaises herbes implique un désherbage méticuleux. Les graines conventionnelles sont donc cultivées avec des pesticides. En cultures de semences bio, le désherbage s’effectue par des interventions mécaniques et/ou thermiques.
Et les hybrides ?
L’intérêt des hybrides, c’est que les plantes directement issues de ce croisement sont souvent plus vigoureuses, plus productives et plus homogènes que celles issues de semences de variétés fixées. On parle de la vigueur hybride. Elles ont quelques avantages. Mais cela n’est valable que pour la première génération. Si vous récoltez les graines issues de ces hybrides pour les semer l’année suivante, vous obtiendrez des plantes très hétérogènes. Effectivement, la seconde génération fait réapparaître toute la diversité du patrimoine génétique des lignées parentales de ces hybrides. On ne peut donc conserver les spécificités de la variété choisie. De ce fait, l’utilisation systématique de variétés hybrides induit une dépendance : il faut acheter chaque année de nouvelles semences. Cette dépendance est soumise au choix de production des semenciers qui s’est souvent fait au détriment des variétés anciennes. De plus, puisque leurs graines ne sont pas ressemées, les hybrides ne participent pas à l’évolution des semences. Pourtant, cette évolution est garante de l’adaptation concomitante des graines et de leur environnement. Ces variétés hybrides sont vendues sous l’identifiant F1, ce qui signifie “hybride de première génération”.
Finalement, la réussite de votre semis (et donc de votre culture) dépendra de la qualité de la graine, passant elle-même par le choix de la variété (classique ou hybride). À ce propos, semer des variétés de graines plutôt locales est une façon de faire vivre le patrimoine culturel et génétique de nos régions.
Antoine Bosse-Platière