Ce rare bourdon-coucou fait partie des abeilles sauvages.
U. Westphal |
Ce contenu est extrait du livre Manuel d’apiculture douce de Undine Westphal.
Les abeilles sauvages sont aujourd’hui sur le devant de la scène, et c’est tant mieux, car leur survie est menacée. Il est donc d’autant plus important de faire quelque chose pour elles.
En général, les bourdons et les abeilles mellifères se tolèrent bien tant qu’il y a assez de nourriture pour tout le monde. En France, on recense 45 espèces de bourdons, le plus commun étant le bourdon terrestre, rayé d’orange et de noir avec la pointe de l’abdomen blanche. Le rayon d’action des bourdons est plus court que celui de l’abeille mellifère et dépasse rarement 1,5 km.
CHERCHE VIEUX TROU DE SOURIS À RÉNOVER
Nid artificiel destiné aux bourdons : carton à l’intérieur et bois à l’extérieur.
U. Westphal |
La plupart des bourdons vivent dans d’anciens trous de souris dans le sol. Ils s’approvisionnent à proximité du nid et butinent tout ce qu’ils trouvent. À cause de leur poids et de la quantité d’énergie qu’ils doivent dépenser pour voler, ils ne sont jamais loin de la famine.
Dès fin février ou début de mars, on aperçoit les premiers bourdons, comme le bourdon terrestre : ce sont les reines qui viennent de quitter leurs quartiers d’hiver. Elles cherchent des fleurs, se nourrissent copieusement et se mettent aussitôt en quête d’un trou où nicher. Grâce à leur fourrure, elles peuvent voler à seulement quelques degrés au-dessus de zéro après s’être réchauffées en faisant vibrer leurs ailes. Volant près du sol, elles explorent chaque trou à la recherche d’un vieux nid de souris abandonné. Ces nids conviennent parfaitement aux bourdons : ils sont au sec et contiennent déjà des matériaux que la reine n‘apporte pas elle-même.
Intérieur d’un nid de bourdon bien isolé avec de la litière pour petits animaux.
U. Westphal |
Une fois qu’elle l’a trouvé, la reine entreprend aussitôt de nettoyer le nid et de le remettre en état. Avec les poils de souris, elle tisse une boule creuse et isolante dans laquelle elle bâtit deux petites urnes grâce à la cire qu’elle sécrète. La première contient le nectar qu’elle a récolté en quelques sorties, la seconde est le berceau destiné aux œufs. Contrairement aux abeilles solitaires, elle y pond quelques œufs : les bébés bourdons aiment bien se blottir les uns contre les autres. L’urne est ensuite remplie d’une bouillie de nectar et de pollen avant d’être refermée. Comme une poule, la reine s’installe sur l’urne pour la réchauffer. L’urne à nectar est à ses côtés et, quand elle a besoin de se nourrir, il lui suffit d’étirer la trompe. Une fois l’urne vide, elle file butiner. Elle ne dispose que d’une demi-heure devant elle, sinon les larves risquent de mourir de froid.
Au bout de quelques jours, les larves éclosent et sont déjà si grosses qu’elles se tissent un cocon chacune, un peu comme des ados qui voudraient maintenant avoir leur chambre à eux.
Environ 20 jours plus tard, les premières ouvrières émergent. La reine a maintenant du soutien et, après quelques séries de naissances, elle se consacre exclusivement à la ponte. Toutes les autres tâches sont désormais assurées par les ouvrières.
Le nid grossit peu à peu et, en été, il peut compter jusqu’à 400 habitantes suivant l’espèce. À la fin de l’été, après 14 jours de mue imaginale, naissent enfin les mâles. Sexuellement mûrs, ils quittent le nid pour toujours. Contrairement aux mâles de l’abeille mellifère, ils sont capables de se nourrir par leurs propres moyens. Ils aiment passer la nuit dans les corolles de grandes fleurs, comme celles des campanules.
L’accouplement a généralement lieu sur les fleurs et les mâles n’en meurent pas, grand merci. Car maintenant, c’est au tour des reines vierges d’émerger. Elles quittent aussitôt le nid, s’accouplent et se cherchent très tôt un lieu abrité où hiverner : une souche d’arbre pourrissante ou un trou dans le sol jusqu’à 50 cm de profondeur. Mais seule une jeune vierge sur dix survivra à l’hiver.
Après le départ des reines vierges, la colonie se désintègre. Les ouvrières dévorent les œufs, en pondent quelques-uns, tuent la vieille reine jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de la colonie. Les fausses-teignes investissent le nid et font le vide.
BRICOLER UN NICHOIR ARTIFICIEL
Si vous avez envie d’aider les bourdons, construisez-leur un nichoir. Il suffit d’une petite boîte en carton de 20 cm de côté. Au centre d’un des côtés, percez un trou de 2 cm de diamètre. Ce sera le nid proprement dit. Pour l’isolation, placez-le dans une caisse (qui doit être étanche à l’eau), dans laquelle vous percerez aussi un trou de 2 cm.
Munissez-vous maintenant d’un tube de carton de même diamètre et reliez le nid à la caisse. Remplissez l’espace vide avec de la litière pour petits animaux, y compris sous le nid. Dans celui-ci, disposez quelques feuilles mortes, de la mousse et une petite boule de kapok qui remplacera les poils de souris. Fermez ensuite le nichoir avec un toit étanche à l’eau et isolé à l’intérieur avec du carton. Fixez ce nichoir légèrement en hauteur dans un endroit ombragé.
Ce clapet en plastique empêche la fausse-teigne de s’introduire dans le nichoir.
U. Westphal |
Et maintenant, patience. Si une reine se présente, la probabilité qu’elle adopte le nichoir augmente avec la durée de sa visite. Ensuite, elle exécute des vols d’orientation autour du nichoir pour mémoriser sa nouvelle adresse. Si, dans les jours qui suivent, vous trouvez un peu de kapok devant le nichoir, c’est qu’il a été adopté. En effet, la reine jette dehors ce dont elle n’a pas besoin.
Au bout d’une semaine, on peut jeter un coup d’œil précautionneux pour savoir si la reine « couve » déjà. Si le nichoir est occupé, un bourdonnement furieux retentit à l’ouverture du nichoir. Refermez-le doucement. Félicitations, votre logis a trouvé preneur.
Les bourdons sont des insectes pacifiques. J’ai installé des nichoirs à bourdons directement contre ma terrasse pour pouvoir observer les allées et venues de ces merveilleux insectes. À l’automne, quand les colonies se désagrègent, je retire ces boîtes en carton et je les jette. Les bourdons ne sont pas très propres et font parfois leurs besoins dans le nid. Trouvez de nouvelles boîtes et installez vos nichoirs au plus tard en février.
Vous pouvez fixer à l’entrée des nichoirs un clapet qui en interdira l’accès à la fausse-teigne. Nocturne, cette dernière repère l’odeur des nids, mais n’est pas assez forte pour soulever le clapet. Cette astuce simple l’empêchera de les détruire.
Le clapet peut être un bout de bois scié obliquement et vissé à l’entrée. Percé d’un trou, il est muni d’une petite plaque de plastique fixée de manière à se relever vers le haut. Les bourdons apprennent à soulever les clapets. On peut les fabriquer soi-même ou les acheter dans le commerce. Avant l’adoption du nichoir par une reine, le clapet doit rester ouvert afin qu’elle puisse le visiter. Une fois le nichoir adopté, on peut rabattre le clapet. Ainsi, vous compléterez votre rucher avec des bourdons.
Bon à savoir
Les bourdons sont très pacifiques et, avant de piquer, ils avertissent d’une charmante manière : ils relèvent la patte médiane à la manière d’un chien qui urine.
Les premières ouvrières à éclore sont souvent très petites parce qu’elles ont été sous-nourries et ont eu trop froid pendant leur développement. Contrairement à l’abeille mellifère, il existe chez les bourdons diverses tailles d’ouvrières. Les plus petites s’activent souvent à l’intérieur du nid.
Les nichoirs à bourdons peuvent être adoptés par diverses espèces. La seule qui ne s’y installera pas est le bourdon des arbres, qui préfère les vieux nichoirs à oiseaux ou les avancées de toit et autres cavités en hauteur. Ce qui n’est pas plus mal, car cette espèce est assez acariâtre quand on la dérange. Ce bourdon a le thorax brun et le bout de l’abdomen blanc, le reste est noir.