Augmenter la teneur en matière organique du sol

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Demandons-nous pourquoi augmenter la teneur en matière organique, et quels sont les liens entre cette teneur et le travail du sol. L’utilisation de compost en quantité suffisante est la manière la plus rapide d’y parvenir, mais quels composts utiliser ?

Faire beaucoup de compost.
J.-J. Raynal
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Cet article est extrait du livre Préparer la terre au potager de Blaise Leclerc.

 

Pourquoi augmenter la teneur en matière organique du sol ?

Augmenter la teneur en matières organiques du sol permet de rendre la terre plus légère, d’augmenter l’aération mais aussi de l’enrichir en éléments nutritifs.

Rendre la terre plus légère

La densité moyenne d’une terre cultivée varie de 1,3 à 1,5, c’est-à-dire qu’1 m3 de terre pèse près d’1,5 t. La densité moyenne d’un compost est de l’ordre de 0,5, c’est-à-dire qu’1 m3 de compost pèse environ 500 kg. L’apport de compost allège donc la terre dans les premiers centimètres sous la surface, ce qui la rend beaucoup plus facile à travailler.

Augmenter l’aération du sol

Nous avons distingué la macroporosité de la microporosité. La première est l’œuvre des vers de terre et autres animaux du sol, la seconde celle des bactéries et des champignons. Nourrir les êtres vivants du sol par des apports de matières organiques variées (paillis, engrais verts, composts) permet donc d’augmenter efficacement l’aération du sol. Le développement des racines s’en trouvera augmenté, ces dernières se frayant plus facilement un chemin dans une structure grumeleuse, enrichie d’apports organiques réguliers, que dans une terre tassée et pauvre.

Apporter des éléments nutritifs

Les matières organiques sont riches en carbone et apportent l’énergie nécessaire aux êtres vivants du sol. Mais elles contiennent également des éléments minéraux qui seront utilisés par les cultures, comme l’azote, le phosphore, le potassium. Ces éléments sont présents en proportions variables selon l’origine des matières organiques. Nous allons voir qu’un compost de déchets verts en contient moins qu’un compost de fumier, ce qui est d’ailleurs intéressant si l’on veut augmenter rapidement la teneur en matière organique du sol, car en apporter en grande quantité ne conduira pas à des excès de minéraux pour les légumes.

 

Faire beaucoup de compost

Pailler et cultiver des engrais verts permet d’entretenir la teneur en matière organique du sol. Mais pour augmenter cette teneur de manière significative dans le but d’améliorer les propriétés que nous venons de lister (une terre plus légère, mieux aérée, plus riche), la solution la plus simple est d’apporter du compost, beaucoup de compost. Le compostage des déchets organiques issus de la maison est en vogue. Depuis le 1er janvier 2024, les collectivités territoriales (communes et communautés de communes) sont dans l’obligation de fournir à leurs administrés des solutions de recyclage de leurs déchets organiques, soit par des collectes sélectives, soit par des solutions de compostage collectif, soit encore en équipant les foyers qui le souhaitent de composteurs individuels. Dans votre potager, vous compostez sans doute les résidus de culture des légumes, les produits de taille, de tontes, etc. Mais tous ces déchets organiques sont-ils suffisants pour enrichir votre sol en matière organique ?

Combien produire de compost ?

Un calcul simple montre que dans la grande majorité des cas, nous ne produisons pas assez de compost, surtout si notre objectif est d’augmenter la teneur en matière organique de notre sol pour le rendre plus facile à travailler.

Calculons la quantité de compost nécessaire pour amender un potager de 200 m² permettant de nourrir un couple toute l’année. Pour un apport moyen de 5 kg de compost par mètre carré, soit 10 litres de compost en volume, il faut 2 000 litres de compost pour ces 200 m², soit 2 m3. Cette quantité est obtenue en compostant au minimum 4 m3 de matières végétales, car au cours du compostage, le volume des tas de compost réduit au moins de moitié.

Les doses de compost nécessaires pour les techniques de l’occultation, des lasagnes et des buttes,  sont encore plus importantes.

Que composter ?

Le compostage permet bien sûr de recycler les déchets de la cuisine et les restes de cultures, de paillis, mais comme nous venons de le calculer, pour pouvoir bénéficier de suffisamment de compost et amender correctement tout le potager, il est nécessaire de composter d’autres déchets organiques. Ceux-ci peuvent venir de votre propriété si elle est assez grande*, sinon ils doivent être importés. Ces déchets organiques peuvent être des tontes de gazon, du foin, de la paille, des broyats de bois, des fumiers.

* On évalue par exemple à 3 tonnes de matière sèche la production moyenne de foin à l’hectare (10000 m²).

 

Importer du compost

Étant donné les doses nécessaires, l’importation de compost est souvent la solution la plus appropriée, surtout si l’on veut mettre en œuvre les techniques d’occultation, des lasagnes ou des buttes. C’est du côté des composts de déchets verts qu’il est préférable de se tourner, car ils peuvent être utilisés sans limite et leur tarif est intéressant (autour de 50 euros la tonne en vrac). Les composts de fumiers, plus chers et plus riches en éléments nutritifs, doivent être utilisés avec parcimonie.

Les composts de déchets verts

Les composts de déchets verts, ou composts verts, sont fabriqués à partir des résidus d’élagage, de tailles de haies, de tontes de gazon, sur de grosses plateformes de compostage, qui en produisent en général plusieurs milliers de tonnes par an. C’est le premier gisement de composts produits en France, disponible sur tout le territoire et de bonne qualité, autorisé en agriculture biologique. Les composts de déchets verts sont avant tout destinés à nourrir le sol, et non directement les plantes. Ils sont moins riches en éléments fertilisants, azote notamment, que les composts de fumiers, lesquels sont également moins disponibles. En revanche, étant fabriqués surtout à partir de déchets ligneux, riches en lignine**, ils sont riches en substances humiques. Ils permettent donc de remonter efficacement le taux d’humus du sol. Ainsi, ils sont particulièrement intéressants dans les sols sableux, qu’ils aident à mieux retenir l’eau et les éléments minéraux.

Ils peuvent donc être apportés à tout moment, légèrement enfouis, ou simplement déposés en surface, mais de préférence recouverts d’un paillis pour éviter leur dessèchement. La dose d’apport peut être très importante pour un sol sableux ou remanié (création d’un jardin après des travaux de terrassement), de l’ordre de 20 kg par mètre carré. Dans des sols limoneux ou argileux, les apports doivent être plus faibles et rester superficiels.

** La lignine est l’une des grosses molécules constitutives des parois des cellules végétales, notamment de tous les végétaux ligneux. Ce sont principalement les champignons microscopiques qui la dégradent.

Les composts de fumier

Les fumiers sont une ressource locale qui peut être utilisée en complément des composts faits maison et des composts de déchets verts, notamment grâce à leur richesse en éléments minéraux, plus disponibles que ceux des composts uniquement végétaux. Privilégiez plutôt les fumiers d’élevages en agriculture biologique. Il est préférable de composter tous les fumiers que vous vous procurez. Les deux principales raisons sont l’assainissement et l’obtention d’un produit plus facile à utiliser. L’assainissement, dû essentiellement à la montée en température, concerne aussi bien la destruction des germes pathogènes contenus dans les excréments des animaux que celle des produits vétérinaires ou de traitement des plantes, mais aussi les graines d’adventices contenues dans la litière. Après compostage, le produit obtenu est beaucoup plus malléable et facile à épandre. C’est important pour certains légumes qui n’aiment pas recevoir de matières organiques fraîches, comme la carotte.

Contrairement aux composts végétaux qui peuvent être apportés en grande quantité, il faut limiter les apports de composts de fumier, car ils sont riches en azote, phosphore et potassium, en particulier le compost de fumier de volaille. Ainsi, les quantités à ne pas dépasser oscillent entre 1 et 5 kg de produit brut par mètre carré et par an : 1 kg pour le compost de fumier de volaille, 5 kg pour le compost de fumier de vache, et 4 kg pour les autres composts de fumier (cheval, chèvre, mouton, porc). Ces quantités sont donc beaucoup plus faibles que celles qui sont nécessaires dans les techniques de l’occultation, des lasagnes ou des buttes. En effet, la dose recommandée de 4 kg par mètre carré correspond à une épaisseur d’à peine 1 cm, alors que c’est une couche de 5 à 10 cm de compost qu’il faut épandre dans la technique de l’occultation, soit jusqu’à 50 kg de compost par mètre carré. Une telle dose de compost de fumier entraînerait des problèmes sanitaires et de qualité sur les légumes cultivés, ainsi qu’une probable pollution du sol et de la nappe phréatique.

 

Blaise Leclerc

 


Les autres composts d’origine urbaine

Toutes les plateformes de compostage ne traitent pas uniquement des déchets verts. Certaines y mélangent des boues issues des stations d’épuration des eaux ou des ordures ménagères non triées à la source. Les composts produits ainsi ne sont pas autorisés en agriculture biologique. Ils contiennent plus de métaux lourds que les composts de déchets verts, surtout ceux à base d’ordures ménagères.

En revanche, quelques plateformes utilisent le contenu des poubelles domestiques triées à la source, qui contiennent uniquement des épluchures ou restes de repas. Mélangé avec des déchets verts, le produit obtenu est appelé « compost de biodéchets ». Sous certaines conditions, c’est un compost qui peut, comme celui de déchets verts, être utilisé par les agriculteurs biologiques. Le fait que le compost soit annoncé comme utilisable en agriculture biologique est pour le jardinier un gage de qualité intéressant. Dans le cas contraire, renseignez-vous bien sur l’origine des déchets entrant sur la plateforme.

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