Je me dis qu’après avoir connu le confinement strict, sans accès à la nature, à être dans l’entre-soi “H24”, les gens seront davantage enclins à comprendre ce que peut ressentir une personne hospitalisée ou se trouvant dans un établissement de soins, de manière plus générale.
La pandémie mondiale a été, c’est le moins que l’on puisse dire, une sacrée contraction et, même si elle a amené avec elle beaucoup d’inquiétudes, de chagrin et de doutes, elle a aussi conduit à plusieurs évolutions positives pour l’humanité et la planète. L’expérience de confinement a permis de prendre conscience de la beauté et de la force de régénération de la nature et nous a ouvert les yeux sur notre besoin irrépressible d’être au contact de celle-ci. Quel bonheur de redécouvrir le calme, privés du va-et-vient incessant des véhicules en tous genres, des avions et autres engins retentissants. Entendre de nouveau le bruit de la nature. Se réenchanter devant les mélodies des nombreux oiseaux qui, habituellement, s’égosillent en ville, peinant à communiquer entre eux, tant l’humain est bruyant, envahissant et totalement irrespectueux de la vie des autres espèces.
PROFESSIONNELS DE SANTÉ ENGAGÉS
Au travers de ces mois écoulés, un coup de projecteur a pu être mis sur le réel engagement des soignants dans leur profession et l’état déplorable dans lequel ils exercent. Les faibles moyens, les priorités administratives qui ne correspondent en rien aux vrais besoins des professionnels de santé engagés sur le terrain, ont pu eux aussi être de nouveau remis en avant. Nous avons alors été des millions à les applaudir à 20 h tous les soirs, en guise de soutien et de reconnaissance des efforts quotidiens qu’ils mènent. Contraction, expansion. Mais que reste-t-il de ces élans de solidarité ? Qu’en est-il de la situation actuelle après cette période de crise ? Cette crise aura-t-elle réellement permis l’amélioration des conditions de travail de ces professionnel·les ? Expansion, contraction.
Combien de discours en faveur de l’écologie ont été prononcés, en public ou dans la cellule familiale, en se jurant réciproquement que nous n’allions pas, en toute cohérence, continuer, à ce rythme de fous et en dépit de tout ? Combien de promesses en faveur d’une vie plus respectueuse, de la nature, des animaux, de soi, ont été prononcées, toujours avec la même et imparable prise de conscience que les choses ne pouvaient plus durer ainsi et qu’un retour à notre vie d’avant ne pouvait, en toute logique, plus être envisageable ? Les gens ont changé. La pandémie les a changés ! Contraction, expansion.
Quand je regarde autour de moi aujourd’hui, je me dis que bien des travers sont revenus à grand galop et que la prise de conscience n’aura été, pour certain·es, que de courte durée. Expansion, contraction.
L’EXPÉRIENCE PANDÉMIQUE, UN RÉVÉLATEUR
Cependant je ne souhaite pas être trop manichéiste et j’ai bon espoir – ah, l’espoir ! – que, malgré tout, cette période de crise sanitaire n’ait pas laissé dans son sillage que du négatif ou des promesses en l’air. Pour ce qui est de mon domaine d’expertise, les jardins de soins, je vois en l’expérience pandémique une formidable aide. Je me dis qu’après avoir connu le confinement strict, sans accès à la nature, à être dans l’entre-soi “H24”, les gens seront davantage enclins à comprendre ce que peut ressentir une personne hospitalisée ou se trouvant dans un établissement de soins, de manière plus générale. J’ai connu des patient·es pour qui l’hôpital avait été le seul et unique lieu de vie et ce, depuis leur plus jeune âge : les soignant·es, les mêmes à qui on accorde toujours aussi peu de moyens, sont leurs seuls repères, leur “famille” et la vie en collectivité reste leur quotidien. Pas 15 jours, pas 4 semaines… mais des mois, parfois, voire des années. Expansion, contraction.
Face à cette réalité de ce que peuvent être véritablement les conditions de vie d’une personne fragilisée dans un établissement de soins, en faisant le parallèle avec notre si petite, mais déjà si marquante expérience pandémique, j’ai une fois de plus l’espoir que davantage de directions, d’élus, de familles, de collectivités locales, d’associations, verront enfin l’importance et l’impact positif que peut avoir la création de jardin de soins sur le bien-être et la santé de tous, patient·es, aidant·es, soignant·es, animaux, planète. Contraction, expansion.
Paule Lebay a longtemps été infirmière coordinatrice dans un centre d’accueil pour personnes Alzheimer. Elle est aujourd’hui consultante en jardins de soins et a publié en mai 2022 Créer un jardin de soins, aux éditions Terre vivante. On peut la retrouver sur plusdevertlessbeton.com.
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